Vivre hors réseau dans le Nord ontarien
9 novembre, 2015 - À la fin de juillet 2015, CBC nous apprenait que le Manitoba, le Québec, Terre-Neuve-et-Labrador, l'Ontario, les Territoires du Nord-Ouest ainsi que le Yukon avaient mis sur pied un groupe de travail panaméricain ayant pour objet de réduire l'utilisation du carburant diesel dans les collectivités éloignées. Le communiqué de presse du ministère de l'Énergie signalait que dans le pays « il y a près de 300 collectivités hors réseau, pour une population totale approximative de 200 000 personnes. » À première vue, ce nombre paraissait très élevé, mais comment cela est-il réparti dans le Nord ontarien et d'où viennent ces chiffres? L'information a été tirée d'un rapport de 2011, d'Affaires autochtones et Développement du Nord (AADNC) ainsi que de Ressources naturelles Canada (RNC); ce document traitait de la situation dans les collectivités éloignées/hors réseau au Canada.
Dans ce rapport, collectivités hors réseau est défini par des peuplements permanents ou à long terme (cinq ans ou plus), comportant au moins 10 logements qui « ne sont pas branchés au réseau électrique nord-américain ni au réseau de gaz naturel canalisé ». L'expression « collectivité éloignée » était également utilisée de façon interchangeable, lors de la description de cette situation. Les auteurs du rapport ont trouvé que le Canada compte 292 collectivités éloignées, qui représentent en tout 194 281 personnes (ce qui repose sur les données du recensement de 2006. Pour l'écrasante majorité de ces secteurs, il s'agit de collectivités autochtones, dont 126 861 personnes (65 p. 100) vivent dans 170 de ces collectivités. Globalement, la Colombie-Britannique compte le plus de collectivités hors réseau ou éloignées, soit 86; viennent ensuite le Québec, avec 44, puis l'Ontario et les Territoires du Nord-Ouest (en troisième position), qui en comptent 38 dans chaque cas.
La situation en Ontario reflète la tendance nationale; 14 236 personnes (67 p. 100) vivant dans 25 de ces 38 collectivités sont autochtones. Dans le cadre des efforts continus de l'Institut des politiques du Nord pour mieux « Connaître le Nord », il est important que cette situation soit connue, afin de comprendre ses effets sur les gens du Nord ontarien.
Cela est un problème depuis pas mal de temps. En 1985, Sigma Engineering a évalué que l'Ontario avait 15 000 personnes vivant dans 43 collectivités éloignées. À peine 10 ans plus tard, RNC indiquait que le nombre d'endroits hors réseau dans la province était le même, mais que la quantité de personnes qui y vivaient avait presque doublé, à 29 296. Dans le récent rapport d'AADNC et de RNC, il a été suggéré que le nombre des collectivités éloignées en Ontario avait chuté, bien que légèrement, mais qu'il y avait encore un nombre considérable de personnes vivant hors réseau. Le tableau des effets sur les humains est compliqué par les limitations de l'Enquête nationale auprès des ménages (ENM), laquelle succède au questionnaire détaillé du recensement; il ne peut donc pas être précisément déterminé si la situation est meilleure ou pire puisque des données récentes ne sont pas disponibles pour 18 de collectivités suivantes :
Collectivité |
Type |
Première Nation/Nom de bande |
Population – (Recensement de 2006) |
Population – (Recensement de l'ENM) |
Whitesand (Armstrong) |
Autochtones |
Whitesand |
247 |
260 |
Auden |
Non-Autochtones |
|
85 |
S. O. |
Bearskin Lake |
Autochtones |
Bearskin Lake |
459 |
400 |
Kitchenuhmaykoosib Aaki 84 (Big Trout Lake) |
Autochtones |
Kitchenuhmaykoosib Inninuwug |
916 |
905 |
Biscotasing |
Non-Autochtones |
|
135 |
S. O. |
Collins |
Non-Autochtones |
|
100 |
S. O. |
Deer Lake |
Autochtones |
Deer Lake |
681 |
795 |
Ebanetoong (Fort Hope 64) |
Autochtones |
Ebanetoong |
1 144 |
1 085 |
Ferland |
Non-Autochtones |
|
81 |
S. O. |
Fort Severn (89) |
Autochtones |
Fort Severn |
567 |
335 |
Graham |
Non-Autochtones |
|
90 |
S. O. |
Gull Bay (Gull River 55) |
Autochtones |
Gull Bay |
206 |
S. O. |
Hillsport |
Non-Autochtones |
|
68 |
S. O. |
Kasabonika |
Autochtones |
Kasabonika Lake |
681 |
895 |
Kee Way Win (Keewaywin [Niska]) |
Autochtones |
Kee-Way-Win |
318 |
340 |
Kingfisher Lake 1 |
Autochtones |
Kingfisher |
415 |
415 |
Lac Seul |
Non-Autochtones |
|
2 160 |
S. O. |
Neskantaga (Lansdowne House) |
Autochtones |
Première Nation de Neskantaga |
265 |
240 |
MacDowell |
Non-Autochtones |
|
22 |
S. O. |
Moose River Crossing |
Non-Autochtones |
|
90 |
S. O. |
Muskrat Dam |
Autochtones |
Muskrat Dam Lake |
252 |
260 |
North Caribou Lake (Weagamow Lake 87) |
Autochtones |
North Caribou Lake |
700 |
805 |
North Spirit Lake |
Autochtones |
|
259 |
270 |
Oba |
Non-Autochtones |
|
75 |
S. O. |
Ogoki/Marten Falls 65 |
Autochtones |
Marten Falls |
221 |
190 |
Peawanuck (Winisk 90) |
Autochtones |
Weenusk (Peawanuck) |
221 |
S. O. |
Pikangikum (14) |
Autochtones |
Pikangikum (14) |
2 100 |
2 280 |
Ponask |
Non-Autochtones |
|
10 |
S. O. |
Poplar Hill |
Autochtones |
Poplar Hill |
457 |
495 |
Ramsey |
Non-Autochtones |
|
4 011 |
S. O. |
Kingfisher Lake 1 |
Autochtones |
Sachigo Lake |
450 |
420 |
Sandy Lake |
Autochtones |
Sandy Lake |
1 843 |
S. O. |
Sultan |
Non-Autochtones |
|
179 |
S. O. |
Summer Beaver |
Autochtones |
Nibinamik |
362 |
S. O. |
Wapekeka 1 (2) (Angling Lake) |
Autochtones |
Wapekeka |
350 |
370 |
Wawakepewin (Long Dog Lake) |
Autochtones |
Wawakapewin |
21 |
S. O. |
Webequie |
Autochtones |
Webequie |
614 |
665 |
Wunnummin Lake 1 et 2 |
Autochtones |
Wunnumin |
487 |
480 |
Totaux |
|
|
26 090 |
12 240 |
Actuellement, Hydro One Remote Communities offre les services à 21 de ces collectivités hors réseau, dans une large mesure à l'aide de génératrices diesel. Selon une vidéo publicitaire rendue publique en 2011, Hydro One transporte entre 14 et 17 millions de litres de carburant chaque année, aux fins du fonctionnement des génératrices pour les Premières Nations. Ce système comporte des défis logistiques considérables et est incroyablement coûteux sur les plans économique et environnemental. Des chercheurs de l'Université de Waterloo ont suggéré que les émissions de dioxyde de carbone provenant des génératrices diesel équivalent aux émissions de 8 000 véhicules automobiles et que ce n'est pas un modèle durable à long terme.
Actuellement, la Première Nation de Deer Lake est la seule collectivité à avoir son propre site hydroélectrique, et la Première Nation de Kasabonika Lake augmente sa production d'électricité à partir d'une génératrice diesel qui a une éolienne de 30 kilowatts. Même si cette production est bien modeste par rapport aux millions de watts produits par les combustibles fossiles de Kasabonika, l'installation de seulement deux de plus réduirait de 10 p. 100 la dépendance au diesel. Les difficultés de transporter annuellement de grandes quantités de carburant vers un grand nombre de ces endroits inaccessibles n'est pas viable à long terme. Sans revoir au complet le système existant des infrastructures, il est nécessaire de penser davantage à l'intégration des sources d'énergie renouvelable dans ces secteurs, telle la technologie du microréseau intelligent. La production d'énergie éolienne et solaire exige des capitaux considérables, probablement beaucoup plus dans ces secteurs en raison de la logistique liée à l'importation des matériaux et du personnel, mais ces coûts seraient facilement recouvrés grâce aux économies de carburant. Cela aiderait aussi à réduire la pollution, un enjeu plus que jamais pressant, compte tenu de l'apparition du changement climatique, et à améliorer les garanties énergétiques locales, car tout cela améliorerait au bout du compte la qualité générale de la vie.
Le groupe de travail panaméricain ayant pour objet de réduire l'utilisation du carburant diesel dans les collectivités éloignées est un bon début, mais il faut être innovateurs pour offrir de l'électricité plus efficiente et à des prix plus abordables dans des secteurs du Nord ontarien.
Par Mike Commito.
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