Les voix du Nord peuvent certes être entendues
6 juillet, 2015 - Le Mowat Centre, institut de recherche associé à l'Université de Toronto, vient de faire paraître un « Programme économique fédéral pour l'Ontario ». Essentiellement, dans ce document, deux questions sont posées et les réponses sont apportées : Quels sont les principaux défis de l'Ontario? Que nous disent les données probantes à propos des meilleurs réactions possible à ces défis?
Pour les gens du Nord, l'importance de ce document ne tient pas qu'aux recommandations politiques qu'il contient (recommandations dont peuvent se servir tout parti politique ou candidat, peu importe le lieu géographique et l'option philosophique). La véritable signification pour le Nord paraît dans la différence qui existe entre le document travail initial du Mowat Centre, rendu public l'automne dernier, et la version finale, publiée ce printemps.
Dans le document initial, il était très peu question des premières nations et des peuples autochtones. Dans le document initial se trouvaient les différences entre les régions, mais sans nous donner une idée de l'ampleur réelle de ces différences, en particulier pour les infrastructures, le transport en commun, le logement, l'attraction des investissements et la main-d'œuvre. Dans le document initial, il n'était pas du tout question de la FedNor : un programme si central de la présence et des activités fédérales, ici dans le Nord, que la simple mention de ce mot en public se traduit par une levée de boucliers de toutes parts.
Dans le document initial, il était question du Cercle de feu et d'une demande au gouvernement fédéral de s'engager à verser comme la province un milliard de dollars afin d'amorcer le développement de la région. Il n'y avait toutefois pas de détails connexes. Nous ne savions pas non plus qui guiderait les dépenses. Il n'y avait pas d'indications sur la façon de faire participer à ces décisions les collectivités touchées (ou même si celles-ci seraient effectivement invitées à le faire). Tous ces points et d'autres sont couverts dans le document final.
Ces questions et points de vue du Nord se trouvent dans un document rédigé par des experts vivant dans la région du « Grand Toronto », parce que les gens du Nord ont pris le temps d'informer ces experts. Entre novembre 2014 et mars 2015, des étudiants, des universitaires, des entrepreneurs, des militants communautaires, des gens du secteur privé, des représentants élus et non élus ont communiqué leurs idées sur ces problèmes qui nous retardent et sur les façons de les résoudre. Les Autochtones et les non Autochtones, les premières nations, les Métis, les jeunes et les aînés ont pu s'exprimer et, dans un contexte de respect mutuel et d'ouverture, ils se sont levés et ont participé.
Ce n'était pas des affirmations gratuites; elles étaient fondées sur des données probantes. Il s'y trouvait des exemples de cas réels du Nord (et d’ailleurs) relatifs à des difficultés qu'eux-mêmes et d'autres avaient eues et surmontées, ou tenté en vain de surmonter. Après tout, savoir quoi ne pas faire est parfois tout aussi important pour les responsables des politiques que savoir ce qui a fonctionné par le passé.
Comprenant que, comme collectivité, nous pouvons faire plus que présenter une liste de griefs, nos discussions ont porté sur les solutions. Il a été demandé à chaque participant de choisir des options, de choisir les choses à faire aujourd'hui, celles pouvant être résolues demain ou plus tard à un moment donné.
Cela a fonctionné. Des priorités claires ont été établies, puis des solutions pratiques reposant sur des données probantes ont été offertes et acceptées. Les experts de Toronto ont écouté. Tout document qui propose un plan cohérent pour une province aussi diverse géographiquement, économiquement et ethniquement que l'Ontario doit, par définition, comprendre certains compromis et éviter complètement d'autres enjeux. Toutefois, la différence entre ce que les experts étaient prêts à dire l'automne dernier et ce qu'ils pouvaient, en toute confiance, dire au printemps est visible à tous.
Il nous faut voir davantage de ce modèle. Des personnes du Nord travaillant ensemble, se parlant, par delà les frontières régionales, culturelles et générationnelles, parlant ouvertement et publiquement, faisant reposer leurs positions sur des données probantes et une véritable réflexion. Prêtes, d'une seule voix, à expliquer ce qu'elles veulent, pourquoi, puis à exposer leurs motifs de croire que cela fonctionnera. Cette collaboration doit devenir plus habituelle que ponctuelle. Lorsque nos plus gros groupes de revendication municipaux ont des réunions communes, cela ne devrait pas faire l'objet d'un communiqué de presse majeur ou susciter des remarques étonnées de la part du public. Ce niveau de communication et de coopération devrait aller de soi.
Ainsi, nous, la population du Nord, n'avons pas encore dit notre dernier mot. Nous devons tirer des leçons de notre réussite en éducation des experts au Mowat Centre et nous en servir dans tous nos échanges avec ceux qui ne sont pas du Nord. En fait, nous devrions aussi tirer avantage de ces leçons lorsqu'il s'agit de nos échanges mutuels. Toutefois, voyons d'abord si nous pouvons maintenir cette réussite. Nous avons une élection fédérale à l'horizon. Sensibilisez le candidat lorsqu'il se présentera à votre porte à l'automne. Le Mowat Centre a compris nos conseils et les a retenus. Les voix du Nord peuvent certes être entendues à Toronto. La prochaine question est celle-ci : peuvent-elles être entendues à Ottawa?
Charles Cirtwill
Président et chef de la direction, Institut des politiques du Nord, groupe indépendant de réflexion sociale et économique et dont le siège social est dans le Nord de l'Ontario. L'Institut des politiques du Nord était partenaire de recherche aux fins du Programme économique fédéral pour l'Ontario.
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