Harmonisation du marché du travail : Éducation dans le Nord
15 août , 2016 - L'harmonisation de l'offre et de la demande du marché du travail est indispensable à l'efficacité économique générale. En présence de tendances telles celles d'une population en baisse, d'une jeunesse émigrante et d'une pénurie grandissante de compétences dans le Nord ontarien, il est plus nécessaire de veiller à ce que l'offre de l'emploi corresponde à la demande, puis que les jeunes adultes aient l'éducation et les habiletés permettant de combler les postes vacants.
Les établissements postsecondaires de la région sont une source majeure de l'offre sur le marché du travail du Nord ontarien[1]. Même si ces collèges et universités évoquent le besoin de répondre à la demande existante du marché du travail, il est à se demander comment et si cela se reflétera dans une politique.
À l'aide des données existantes de l'Enquête sur les postes vacants et les salaires que publie Statistique Canada, les types d'emplois qui sont les plus en demande paraissent clairement. De même, en utilisant les taux de diplomation des établissements postsecondaires de la région, ce qui provient des Données universitaires communes de l'Ontario (DUCO) et des chiffres publiés par les collèges eux-mêmes, nous voyons clairement aussi quelles qualifications alimentent le système d'approvisionnement.
À l'aide de l'Enquête sur les postes vacants et les salaires, selon les catégories de la Classification nationale des professions (CNP), c'est le secteur des ventes et des services qui compte le plus postes vacants dans le Nord. Toutefois, ces postes vacants n'exigent généralement pas d'agrément professionnel ou d'autre sorte de certification; pour beaucoup de ces postes, il faut plutôt un diplôme d'études secondaires ou moins. Comparer les postes vacants et les données sur la diplomation ne sera alors guère utile[2].
Après les ventes et services, les deux régions ont le plus de postes vacants dans métiers, transport, machinerie et domaines apparentés (333 dans le Nord-Ouest et 851 dans le Nord-Est).
Pour déterminer l'offre des diplômés dans chaque catégorie de la CNP, au sein de celle-ci, chaque programme de diplomation a été classé dans le programme avec lequel il était le plus en harmonie (c.-à-d., pour les diplômés en soins infirmiers, dans « Professions de la santé »)[3]. Cette méthode a ses limites mais a été soigneusement conçue pour harmoniser le mieux possible les programmes et les classifications professionnelles[4].
Cet écart qui constitue l'un des plus grands risques pour le marché du travail du Nord ontarien existe dans métiers, transport, machinerie et domaines apparentés. Dans le Nord-Est, il y avait plus de 100 postes vacants que de diplômés; dans le Nord-Ouest, l'écart dépassait 200.
Ce manque d'harmonisation a des répercussions majeures sur les économies de la région, car le Conference Board du Canada estime que la pénurie de travailleurs qualifiés coûte à l'économie de l'Ontario plus de 24,3 milliards de dollars annuellement, sous forme de perte de PIB.
Le besoin d'un plus grand nombre de gens de métiers qualifiés a été souvent signalé dans le Nord, notamment par la Chambre de commerce de Thunder Bay, qui reconnaît que ces emplois sont essentiels à la croissance et au développement.
Il est à se demander si cette pénurie est purement attribuable au manque d'étudiants, car le nombre des diplômés des deux régions a dépassé celui des postes vacants en 2015. Cela pourrait plutôt s'expliquer par une idée fausse majeure entourant l'enseignement des métiers spécialisés en Ontario, à savoir, que ces domaines sont souvent perçus à tort comme inférieurs à ceux de la programmation universitaire.
En vue d'augmenter l'offre de diplômés des programmes connexes, il faudra changer les perceptions liées aux métiers spécialisés. Ce changement de société n'en est pas un qui se fera du jour au lendemain, mais il y a un certain nombre de choses à faire afin que cela se produise avec le temps.
L'étape la plus simple relève des parents, des enseignants des écoles secondaires et des conseillers en orientation; en effet, ils peuvent cesser de voir les métiers spécialisés comme « la deuxième option », et en faire plutôt une option viable pour les élèves de toutes les aptitudes scolaires.
Heureusement pour le Nord ontarien, le bas niveau d'acceptation sociale des métiers n'est pas un phénomène mondial et, pour nous guider, nous pouvons voir un exemple dans le monde européen.
En Allemagne, qui se vante d'avoir un « double système » d'enseignement (offrant aux élèves l'option de partager leurs dernières années de scolarité entre la classe et la formation au travail), 82 % du public perçoit positivement une formation professionnelle. Il n'y a pas à douter que ce soit relié à la vraie valeur accordée à chaque type de profession.
L'Ontario n'a pas besoin de réinventer la roue lorsqu'il s'agit d'éducation, mais des étapes peuvent être franchies pour améliorer la situation. Le Programme d’apprentissage pour les jeunes de l’Ontario (PAJO), qui permet aux élèves du niveau secondaire d'acquérir de l'expérience pratique et une accréditation dans n'importe quel métier spécialisé, est essentiellement l'équivalant ontarien pour les métiers spécifiques.
Élargir le PAJO et le faire connaître aux élèves de toutes les orientations scolaires ferait partie intégrante de la présentation de la véritable valeur de la formation professionnelle, diminuerait le côté péjoratif qui l'entoure et pourrait potentiellement stimuler l'offre pour les EPS de la région.
Prendre ces mesures bénéficierait grandement à l'économie du Nord ontarien. Éliminer la pénurie de métiers spécialisés stimulerait le PIB de la région ainsi que les recettes fiscales.
Un marché du travail plus harmonisé conduirait aussi à des niveaux inférieurs de chômage et, par conséquent, à moins de prestataires d'assurance-chômage. Harmoniser le marché signifierait également moins d'émigration régionale, surtout chez les jeunes extrêmement mobiles.
Le Nord ontarien a les diplômés pour combler les divers postes vacants du marché du travail; il est temps de faire des efforts pour voir à ce que les établissements d'enseignement continuent d'être vraiment sensibles aux besoins de la région, en éliminant l'aspect péjoratif entourant les programmes pour les métiers.
Jarrod Sundmark est un stagiaire politique à l’Institut des politiques du Nord
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[1] Les Nord ontarien comprend les régions économiques du Nord-Ouest et du Nord-Est, lesquelles contiennent respectivement à peu près 30 et 70 % des quelque 780 000 habitants (Statistique Canada 2015). Le Nord-Ouest ontarien compte un collège et une université; en revanche, il y a trois universités et cinq collèges dans le Nord-Est de l'Ontario. Les données du Collège Boréal (Nord-Est) relatives au nombre de diplômes remis en 2014 étaient indisponibles.
[2] Les caractéristiques des postes vacants de l'Ontario pour le secteur des ventes et des services (moyennes ontariennes de 2015) montrent que 87,63 % de ces postes n'exigent pas d'agrément professionnel ou un autre type de certification; par contre, pour 12,63 % de ces emplois, il faut un certificat professionnel ou d'un autre type. Pour davantage d'information, veuillez consulter l'Enquête sur les postes vacants et les salaires, Statistique Canada, tableau CANSIM 285-004.
[3] Pour cette analyse, l'auteur a créé une matrice dans laquelle servaient les caractéristiques des diplômés postsecondaires ainsi que des postes vacants de la CNP.
[4] Les grades de la colonne « Autre » étaient trop généraux pour les classer et représentaient 152 diplômés du Nord-Ouest ontarien et 106 du Nord-Est.